Plusieurs
critiques de vin réfèrent souvent aux dénominations ancien et nouveau monde. Mais
de quoi parlent-ils au juste?
La
référence géographique est simple. L’ancien monde est constitué de la France, l’Italie
et l’Espagne. Le nouveau monde est constitué des États-Unis, de l’Argentine, du
Chili, de l’Afrique du Sud, de l’Australie et de la Nouvelle-Zélande. Dans l’ancien
monde, on fait du vin depuis l’antiquité – la Grèce et plusieurs pays du Moyen-Orient
devraient d’ailleurs être ajoutés à la liste – tandis que pour le nouveau
monde, c’est plus récent. On notera tout de même que des vignes ont été
plantées dans ces nouveaux pays dès le début de la colonisation. En Afrique du
Sud par exemple, l’histoire du fameux vin de Constance remonte à 1685 !
Photo Flickr par Norman B. Leventhal Map Center at the BPL |
Une des
différences les plus évidentes entre les deux mondes est la vision de ce qui
définit un vin. Alors qu’en Europe on privilégie la notion d’appellation
géographique, le nouveau monde a suivi la voie californienne des cépages. Évidemment,
chaque appellation est limitée à un ou plusieurs cépages, mais les européens
jugent que le « terroir » est la clef de voûte qui établit ce qu’est un vin. J’ai
mis le mot terroir entre guillemets, car s’il est utilisé à outrance, sa signification
est parfois variable. Pour certains, le terroir inclut une notion de traditions
et donc une définition précise de méthode de vinification et de type de vin. Les
vignerons du nouveau monde ont longtemps défini leur vin comme l’expression d’un
cépage donné. Leur objectif est donc de produire le style de vin qui, selon
eux, correspond à ce que devrait être un Cabernet-Sauvignon ou un Pinot Noir,
par exemple.
Mais quand
vous lisez une critique qui parle d’un vin « nouveau monde », il réfère en fait
à des stéréotypes de styles. Un Cabernet-Sauvignon fait de raisins surmûris,
avec un maximum d’extraction pour obtenir un vin hyper dense aux saveurs
percutantes. Ou un Chardonnay au boisé très appuyé qui vous donne l’impression
de lécher une barrique. Si ces caractéristiques existent bel et bien dans
certaines cuvées, il reste que les vignerons des pays du nouveau monde ont bien
évolué dans les 20 dernières années.
On y trouve
désormais une palette aussi large de types de vins qu’en faisant le tour du
vieux continent. Et vous lirez souvent que tel Chardonnay ou Pinot ressemble à
s’y méprendre à un Bourgogne. Sans compter que je découvre de plus en plus de
cuvées qui ont des personnalités carrément différentes, bien à elles. Je pense par
exemple au Sauvignon blanc de K Vintners, qui provient de Columbia Valley dans
l’État de Washington. Il ne se distingue pas seulement par son étiquette, dont
j’avais parlé dans ce billet, mais aussi par son acidité tranchante et ses
saveurs explosives. À l’inverse, le Chardonnay Locura 1 du vignoble Clos des Fous au Chili est d’une finesse et d’une élégance remarquables.
C’est aussi
vrai pour des vins plus abordables, comme le Cabernet-Sauvignon californien de la maison Bonterra, qui, en plus d’être bio, est un rouge harmonieux, très loin des
stéréotypes du Cab survitaminé. Par contre, si vous vous demandez ce qu’est un
style nouveau-monde, essayez cet argentin produit par un vigneron français, le Clos de los Siete : un rouge corsé aux saveurs marquées et au boisé bien
présent, mais qui ne tombe pas dans la caricature.
Personnellement,
je remarque une autre différence entre les deux mondes. Les vignerons des
nouveaux pays sont plutôt à l’écoute des clients, de leurs goûts et de leurs
commentaires. Inversement, on trouve en France un bon nombre de « gens qui
savent », et qui savent tellement qu’ils sont prêts à imposer leur vision
envers et contre tout. Les clients qui n’aiment pas leur cuvée oxydée, mais ce
sont des ignares. Les vignerons qui ne pensent pas comme eux, rien de moins que
des empoisonneurs ou des bandits.
Oui, ce
comportement prétentieux me tape sur les nerfs. C’est un peu pour ça que vous
voyez davantage de vins italiens, espagnols ou grecs dans mes recommandations
récentes. Je vous promets aussi de faire une plus grande place au nouveau
monde, que j’ai négligé depuis le début de ce blogue. Et rassurez-vous, je ne
snoberai pas les belles cuvées de l’hexagone, surtout qu’on y trouve malgé tout plein de vignerons sympathiques et qu’après tout, ce qui compte le plus… c’est
le contenu de notre verre !
À votre
santé !
Alain P.
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