Vendange à la main, c’est parfois écrit sur
l’étiquette, souvent mentionné dans la fiche technique ou dans les
présentations des vignerons, il est donc logique de se demander si c’est un
critère de qualité valide. D’autant plus que dans les vignes d’Europe, les vendanges commencent.
Avant de réfléchir sur le sujet, il faut évidemment
savoir que de nos jours, la majorité des raisins destinés à produire du vin ne sont
pas cueillis à la main mais ramassés avec des machines à vendanger. On en avait
parlé dans un billet précédent, où on avait aussi expliqué leur
fonctionnement : Les vendanges à la machine, comment ça marche ?
Comme on
l’avait expliqué dans notre billet sur les machines à vendanger, celles-ci ne
peuvent pas récolter dans tous les vignobles. Par exemple, elles ne peuvent pas
travailler sur des vignobles en terrasses ou en forte pente, ni sur des vignes
taillées en gobelets (bush vines en anglais) ou avec des raisins très près du
sol. Comme elles récupèrent seulement les grains de raisins, elles ne
conviennent pas non plus lorsque les vignerons veulent récolter des grappes
entières. Ceci est requis par certains décrets d’appellation, notamment en
Champagne et dans le Beaujolais, mais c’est aussi nécessaire pour faire des
macérations carboniques ou semi-carboniques. Certains vignerons utilisent
parfois des grappes entières pour profiter des tanins des rafles des raisins. Je
remarque que plusieurs vins dans ces situations affichent fièrement "vendange
à la main" sur leurs bouteilles. C’est tout à fait vrai mais il n’y a aucune
démarche de qualité derrière cela car en fait il n‘est pas possible de faire
autrement…
Il est aussi
vrai que les premières générations de machines à vendanger avaient des lacunes.
Elles ramassaient souvent autre chose que des grains de raisins, par exemple
des feuilles, et comme tout arrivait dans une grande benne, il pouvait se
produire des macérations ou des débuts de fermentation indésirables et pollués.
Les nouvelles machines ont des systèmes de tri optique et les bennes sont
fractionnées. De nombreux vignerons déclarent maintenant pouvoir faire des
vendanges très qualitatives avec ces machines et leurs vins prouvent qu’ils
disent vrai. Selon eux, il faut une bonne machine, qu’elle soit bien réglée et
conduite avec précision à la vitesse adaptée aux conditions de la vigne à
récolter.
Néanmoins, la
récolte à la main a certains avantages. Il est possible de choisir les grappes
qu’on récolte (alors que la machine ramasse tous les raisins des vignes où elle
passe). C’est utile dans les situations où on veut éviter de ramasser des
grappes dont plusieurs grains sont moins mûrs ou affectés par la pourriture
grise ou le botrytis. C’est même indispensable pour effectuer des vendanges par
tries (en plusieurs passages, en récoltant seulement une partie des raisins à
chaque fois) comme on le fait pour les vins de Sauternes. Évidemment cela
implique d’avoir des vendangeurs expérimentés et qui travaillent avec soin.
Un autre avantage est qu’on peut placer les grappes
récoltées dans de petites cagettes, pour éviter que les grains soient
endommagés comme lorsqu’ils tombent dans une benne assez profonde. C’est d’ailleurs
la méthode utilisée pour les grands crus, qui recherchent tous les détails pour
améliorer la qualité (et où on a un budget suffisant pour employer des
travailleurs d’expérience). Et c’est particulièrement vrai pour les cépages qui
ont une peau plus fragile, comme le pinot noir.
En conclusion, on peut donc dire que ce n’est pas la
méthode de vendange qui est véritable le critère de qualité. C’est plutôt le
soin avec lequel l’équipe travaille qui fait la différence. Comme disait mon
père, travailler à la main c’est très bien, à condition de ne pas travailler
comme un pied. C’est pour cette raison que sur HippoVino on ne mentionne jamais
le mode de vendange utilisé, car c’est rarement significatif.
À la bonne vôtre !
Alain P.
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