Au Québec
la vente de vin est un monopole d’État et tout le système touchant à la vente
des alcools est plutôt complexe. Il nous a d’ailleurs fallu 4 billets pour
l’expliquer :
- Le commerce du vin au Québec expliqué aux Français qui arrivent - Partie 1
- Québec : Levin au restaurant expliqué aux Français qui arrivent - Partie 2
- Le vin au Québec expliqué aux Français qui arrivent - Partie 3
- Commandes et importations privées, dernier volet sur le commerce du vin au Québec.
Cependant ce
monopole est régulièrement remis en question dans les médias. En avril dernier,
un rapport préparé par des économistes recommandait la privatisation de la SAQ.
Celui-ci fut écarté rapidement par le gouvernement du Québec, mais le 8
juillet, un autre rapport recommandait cette fois de briser le monopole et de
permettre la concurrence. Quelques jours plus tard, c’était au tour d’un
professeur d’économie d’en rajouter une couche en critiquant sévèrement la gestion de la SAQ.
Si les débats économiques sont souvent
abstraits et ennuyeux pour le commun des mortels, celui concernant le monopole
de la SAQ est plus simple à analyser.
Quels sont
les principaux problèmes reliés à ce statut selon les contestataires?
Le premier
questionne la base du processus : pourquoi l’État devrait-il se mêler de
vendre des alcools? On pouvait autrefois le justifier par des arguments liés au
contrôle exercé par le crime organisé durant la prohibition, mais cela ne tient
plus au 21e siècle. Par contre, le monopole rapporte annuellement plusde 1 milliard de profits au gouvernement, en plus des 630 millions de taxes versées au trésor québécois. En cette période de disette budgétaire, je vois
mal un gouvernement se priver d’une telle manne.
Le second
concerne sa politique de prix qui nuirait au consommateur en imposant des prix
élevés. S’il est clair que le prix de vente des vins et alcools de la SAQ est
élevé, plusieurs comparaisons récentes avec son équivalent ontarien montrent 2
monopoles globalement très proches. La principale cause des prix élevés est de
toute évidence liée aux plus de 2 milliards de $ de revenus et taxes versés aux2 niveaux de gouvernement sur 3 milliards de ventes. Ces montants sont dictés
par les politiciens et non par les gestionnaires de la SAQ.
Dans un
même ordre d’idées, on estime souvent que la gestion de la société d’état est
peu efficace et laisse la part belle au syndicat des employés. Le professeur
Charlebois écorche notamment la performance des employés en comparaison de ceux
de la LCBO. Malheureusement, les chiffres qu’il utilise sont erronés et de
plus, il oublie que les employés de la LCBO vendent principalement de la bière
et des spiritueux. Il s’agit donc de transactions simples et rapides, alors que
les employés de la SAQ doivent passer plus de temps avec les clients pour les
conseiller dans la vente de vin. De plus, le même professeur affiche son
ignorance en parlant des 40% de vins ontariens vendus par la LCBO. Rappelons
qu’il s’agit pour la grande majorité de vins embouteillés au Canada avec
seulement un peu de contenu local (voir les explications dans cet autre billet), le vrai chiffre est de 2.5%.
Au final, je
vois donc peu d’arguments solides pour défendre la privatisation, à tout le
moins dans un contexte où nos gouvernements sont à la recherche de revenus
additionnels pour maintenir des services importants pour les citoyens, comme
l’éducation et la santé.
Il y a quand
même la question du choix de produits, qui serait restreint par les décisions
des acheteurs de notre cher monopole. Avec près de 9000 vins et plus de 1500
spiritueux, la SAQ fait néanmoins bonne figure. Si on y ajoute les quelques
milliers de vins en importation privée plus la possibilité de faire des
commandes privées, l’argument devient plutôt faible.
Mais quand
on parle de sélection de produits, on peut toujours trouver à critiquer et je
ne manque pas de souligner ce qui m’apparaît comme des lacunes. J’ai déjà
déploré le moindre choix de vins du nouveau monde et l’impossibilité de trouver
les vins gagnants des trophées internationaux. Je dois maintenant avouer les
progrès accomplis par la SAQ dans ces deux domaines. J’ai d’ailleurs signalé
récemment qu’on pouvait trouver un des derniers vins notés 100/100 par Robert Parker.
On trouve aussi, même s’il en reste malheureusement très peu, le Bouissel 2011,médaille d'or et récent vainqueur du International Trophy du magazine britannique Decanter.
Malgré tout, il reste
encore de la place à l’amélioration dans la vente de vins au Québec,
nous en parlerons dans un prochain billet.
D’ici là, à
la bonne vôtre !
Alain P.
Fiche du Bouissel 2011 sur le site Hippovino (Hipponote 3.5* Prix SAQ 20.85 $)
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