On entend
souvent dire que le vin est une boisson fragile ou encore qu’un vin peut «
casser » lorsqu’il est maltraité. Dans ce contexte, on ne parle pas de briser
la bouteille mais plutôt d’altérer brutalement les saveurs de son contenu. Nous
avons vu dans un billet récent que plusieurs conditions sont requises pour conserver nos bouteilles en parfait état, ceci veut-il dire que le vin est
effectivement très fragile?
Le mot fragile
n’est pas vraiment adapté pour le vin, car s’il peut effectivement s’altérer au
point de devenir moins bon ou carrément mauvais, c’est un processus
relativement lent en général. Tant que le bouchon est assez étanche, cela
prendra plusieurs semaines ou même mois pour qu’un défaut puisse le dégrader
sévèrement.
Lorsqu’on
parle de vins courants de moins de 10 ans, on a même affaire à des boissons
plutôt résilientes, qui peuvent survivre à des écarts de température, des
changements de position (un passage en position de bout de quelques semaines
par exemple), les vibrations inhérentes à certains modes de transport, bref
tout ce qui n’est pas idéal.
En
fouillant un peu sur Internet, vous trouverez même des cas de malversations
plus brutales sans conséquences graves. Par exemple, des personnes qui ont placé une bouteille au
congélateur pour la rafraîchir (je le fais fréquemment et je peux vous confirmer que
20 minutes au congélateur n’altèrent aucunement le vin) mais qui l’ont oubliée
là assez longtemps pour que le vin gèle. Après avoir laissé la bouteille à la
température de la pièce pour que le vin dégèle, on constate qu’il est revenu à
son état normal. On trouve aussi des zigotos qui aèrent leur vin très
violemment, par exemple avec un mélangeur électrique. Là encore, rien de cassé,
mais l’équivalent d’un vin qui a reposé en carafe une heure ou deux. Les vins
courants n’ont donc pas la fragilité d’une coupe de cristal.
Alors
pourquoi vous ai-je dit de conserver votre vin couché dans une cave fraîche, sombre
et sans vibration? Parce que si vous
vous écartez trop de ces conditions idéales, le nombre de bouteilles
défectueuses va augmenter nettement après quelques mois. Dans des conditions habituelles,
on estime qu’entre 1% et 2% des bouteilles peuvent présenter un défaut. Ce
nombre peut monter à 8% et même plus après plusieurs mois en dehors des normes,
ce qui est plutôt désagréable.
Je parlais
plus haut de vins courants car il y a quand même des exceptions. D’une part,
les vins dits «naturels », avec très peu voire même aucun soufre ajouté, sont
nettement plus vulnérables.
D’autre
part, les vieux vins peuvent effectivement être qualifiés de fragiles. Dans les
cuvées plus jeunes, l’acidité, les tanins et, lorsque du soufre a été ajouté
avant la mise en bouteilles, les sulfites libres, protègent contre l’oxydation.
Avec le temps, ces défenses tendent à diminuer et le vin s’oxydera très vite
lorsqu’il sera en contact avec de l’oxygène. Tout ce qui peut provoquer un
léger descellement du bouchon, par exemple des variations de température un peu
brutales ou des vibrations ou encore une atmosphère trop sèche, risque donc d’être
fatal à nos vieilles bouteilles en peu de temps.
Par contre,
ces vieux vins peuvent quand même être déplacés et subir des changements de
température progressifs sans grand risque. Notez néanmoins que déplacer la
bouteille remuera le dépôt et qu’il est préférable de la laisser reposer un peu
avant de la servir.
À la bonne
vôtre !
Alain P.
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