Notre billet de la semaine dernière expliquait la notion de sucre résiduel, la
définition d’un vin sec et qu’il était normal que certains vins soient très
sucrés (ce qu’on appelle les liquoreux), d’autres seulement un peu ou pas du
tout. Par contre, pour les vins qui contiennent plus que 10 grammes de sucre
résiduel, on note des écarts importants entre le jugement des professionnels et
celui des consommateurs moyens.
Les
sommeliers ou critiques vont encenser certains vins blancs d’Alsace ou
d’Allemagne plutôt sucrés ou bien sûr les fameux Sauternes, des cuvées assez
peu vendues, souvent fort chères d’ailleurs. Par contre, les consommateurs
achètent beaucoup certains vins rouges avec 10 à 15 g/L de sucre, comme le
Liano, le Ménage à Trois, l’Apothic Red ou encore des White Zinfandel rosés qui
en contiennent environ le double. Ces vins suscitent des commentaires très
négatifs, pour ne pas dire méprisants des pros. Au mieux ceux-ci diront, avec
un brin de condescendance, que ce sont des vins pour les débutants, que ces
buveurs passeront ensuite aux vrais vins. Au pire, ils les compareront à du
coca-cola (qui contient en réalité 90 g/L de sucre, la comparaison est donc
disproportionnée).
Pourquoi
certains vins peuvent-ils être sucrés et appréciés des critiques et d’autres
non? Il y a deux raisons.
La première
est liée à l’origine de ce sucre résiduel. Certains cépages blancs peuvent être
vraiment très sucrés. Les raisins gelés (utilisés pour les vins de glace),
botrytisés (pour les Sauternes) ou cueillis très tard (pour les vins de vendanges
tardives) contiennent énormément de sucre. La fermentation ne peut jamais tout
le transformer en alcool et il y restera donc un niveau élevé de sucre
résiduel. Celui-ci est d’origine « naturelle » et n’indispose par les pros.
Par contre,
certains producteurs ajoutent du sucre, ou plus précisément du moût concentré,
à leur vin après la fermentation(*). Le jus de raisin concentré étant très
sucré, cela crée un sucre résiduel « artificiel » qui est très mal vu par bien
des sommeliers. Pour eux ce sont des vins édulcorés, pour ne pas dire
trafiqués. Cette pratique venue du nouveau monde est maintenant autorisée en
Europe, mais néanmoins proscrite dans les appellations prestigieuses.
La deuxième
raison est reliée à la notion d’équilibre, dont nous avions parlé dans notre
billet : L’acidité dans le vin, l’importance de l’équilibre. Un sucre
résiduel élevé doit être compensé par une forte acidité et si le taux d’alcool
est également un peu haut, le vin peut facilement paraître lourd ou mou. Par
contre, l’appréciation de cet équilibre est très variable selon les personnes
et dépend aussi des conditions de consommation. En mode dégustation, la
lourdeur est plus évidente que lorsque le vin est bu sans trop d’attention. Et
dans une dégustation de nombreux vins comme le font souvent les pros, les cuvées un peu lourdes seront plus
désagréables encore.
Chez
HippoVino, nous ne portons pas de jugement sur les goûts de chacun, comme nous
l’avons clairement expliqué ici : La définition d’un bon vin, c’est quoi?
La formule de notre site Web privilégie les vins qui ont eu des critiques
favorables, c’est pourquoi les bouteilles mentionnées plus haut n’y sont pas.
Par contre, nous n’éliminons aucun vin sur la seule base de son taux de sucre.
Si vous aimez vos rouges un peu plus doux mais néanmoins équilibrés, essayez par exemple le Periquita Reserva, le Quinta das Setencostas Alenquer, le Montecorna Valpolicella Ripasso
ou encore le Famiglia Pasqua Black Label Amarone.
À la bonne
vôtre !
Alain P.
(*) Les vignerons ont la possibilité d’ajouter
du sucre ou du moût concentré avant la fermentation, c’est ce qu’on appelle la chaptalisation. Ceci permet d’élever le degré d’alcool du vin lorsqu’il a fallu
le récolter avant sa pleine maturité, souvent en raison d’aléas
météorologiques. Cette pratique est réglementée et contrôlée dans les vins d’appellation.
Avec le réchauffement climatique, elle est moins pratiquée de nos jours, sauf
en cas de météos exceptionnelles. Cette notion de conditions exceptionnelles est
utilisée trop libéralement selon certains, mais les critiques sont en général
moins virulentes que pour l’édulcoration après fermentation.
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