jeudi 21 août 2014

Vins du Québec, un avenir prometteur – suite et fin

Notre billet précédent «Vins du Québec, un avenir prometteur – Partie 1 » a permis de mieux comprendre le vignoble québécois et sa production. Aujourd’hui nous allons compléter le portrait en parlant commercialisation. Comme nous l’avions déjà mentionné, l’œnotourisme est le principal canal pour la plupart des vignobles d’ici qui vendent la grande majorité de la production à la propriété. Mais pour se développer au-delà du mode artisanal, il faut aller plus loin.

Comparaison SAQ et LCBO

Les représentants de l’industrie et les médias ont longtemps souligné la très faible présence de nos vins locaux sur les tablettes de notre monopole d’état, surtout en comparaison des autres provinces canadiennes. Un exemple d’article sur le sujet : Quelle place pour les vins québécois?

Selon cet article les vins ontariens représentent 40 % des ventes de la LCBO contre moins de 1 % pour ceux du Québec à la SAQ. La comparaison est trompeuse car les grosses ventes sont les vins embouteillés au Canada, dont jusqu’à 75% du contenu est importé. Voir à ce sujet les fiches Wikipedia [Canadian wine] et [Cellared in Canada]. Ces vins ressemblent en fait à ce qu’on appelle ici les « vins d’épicerie » dont nous avons parlé dans le billet : Le commerce du vin au Québec expliqué aux Français qui arrivent.

En réalité, les vins 100% canadiens certifiés VQA (Vintners Quality Alliance) représentent seulement 2.5% du catalogue de la LCBO, un chiffre très différent du précédent.
Source saq.com

Nette évolution à la SAQ

Depuis quelques mois et suite à une demande gouvernementale, la SAQ a décidé de faire la promotion des vins du Québec avec notamment le programme Origine Québec. La page Web Origine Québec est d’ailleurs très bien réalisée avec notamment les listes des vins primés dans des concours internationaux, des capsules sur les différents types de produits et sur le programme des vins certifiés (équivalents aux VQA canadiens). Le résultat a été immédiat et les ventes ont augmenté de plus de 40% selon Radio-Canada. Bon progrès, mais où en est-on dans l’offre?

En date du 19 août 2014, il y avait 11 753 produits sur le site de la SAQ dont 372 (3.2%) font partie du programme Origine Québec.

La majorité des produits québécois sont 153 cidres qui représentent 41% de l’offre de boissons d’ici. La SAQ offre 76 vins tranquilles (excluant cidres, vins mutés, vins de dessert, vins effervescents) provenant du Québec, soit un peu moins de 1% des 8720 vins offerts au total.

Quelques défis en vue

On peut bien sûr trouver que 76 vins sur 8700, c’est encore peu. C’est que la croissance des ventes de vins québécois à la SAQ met en évidence les défis de nos producteurs, comme l’a bien montré David Pelletier dans son billet : Ils étaient quatre.

On avait vu dans notre article précédent que les vignobles québécois sont petits en comparaison de leurs homologues canadiens. Ils peinent donc à produire les quantités requises pour répondre aux besoins d’un grand détaillant comme la SAQ.

Un autre défi concerne la qualité. La SAQ souhaite commercialiser des vins répondant à des standards de base bien établis et préfère donc les vins qui respectent les normes du programme Vins du Québec certifiés. Certains vignerons refusent ce programme, tout comme ils refusent d’adhérer à l’AVQ. Notons que le programme de certification est accessible à tous les producteurs, membres de l’AVQ ou non, et que les contrôles sont effectués par un organisme indépendant.

Il y a de mauvaises façons de résoudre ces problèmes. Augmenter le rendement des vignes au-delà de certains seuils affecte la qualité des vins produits, ce n’est donc pas souhaitable comme l’indique David. Produire des vins équivalents au « Cellared in Canada » ontariens en ajoutant des moûts de vins étrangers, serait encore pire.

Un avenir prometteur

Personne n’a d’intérêt dans les mauvais choix cités plus haut, ni la SAQ, ni les producteurs. Donc, même si des difficultés sont à prévoir, plusieurs raisons nous incitent à l’optimisme pour les vins du Québec.

Les changements climatiques entraîneront un adoucissement des températures qui sera favorable pour nos vignerons. Peut-être même pourront-ils bientôt cultiver davantage de cépages internationaux.

La question des quantités requises pour un grand réseau de distribution n’est pas unique au vin et a été résolue pour les autres producteurs alimentaires québécois. Les grands détaillants se sont dotés de programmes pour faciliter l’accès aux petits producteurs, comme l’explique cet article du journal La Presse : Quand les supermarchés courtisent les producteurs locaux. Si Walmart l’a fait, la SAQ peut aussi le faire, c’est simple : tout le monde ne doit pas vendre partout.

En plus la croissance des grands vignobles sera propice à la création d’un marché de raisin ou de vrac qui permettra à de petits vignerons de tirer leur épingle du jeu sans avoir à négocier avec la SAQ.

Comme ils doivent vendre à la SAQ moins cher qu’à la propriété, certains vignerons se plaignaient de la baisse de leur marge de profit. Le Gouvernement du Québec a accepté de les aider en versant 2 $ supplémentaires par bouteille pour les ventes au monopole d’état. Un autre obstacle de réglé.

Bien sûr, les vignerons vont aussi devoir faire leur part, tout d’abord en investissant dans leur vignoble. L’accès à un canal de distribution comme la SAQ leur facilitera grandement la recherche de financement. Ils devront aussi accepter de suivre les normes de qualité de l’industrie et s’ils décident de se grouper au lieu de se déchirer, tous seront plus forts.

En même temps certains feront le choix de rester des artisans qui vendent à la propriété et c’est très bien ainsi. S’ils font de vrais bons vins, ils ne manqueront jamais de clients.

Les évènements

Un autre canal de vente intéressant pour les vignerons québécois est celui des nombreux événements et salons de vins à travers la province.
Source www.fetedesvendanges.com

Le prochain est la Fête des vendanges Magog-Orford dont l’édition 2014 aura lieu les 30, 31 août, 1er, 6 et 7 septembre. Vous pourrez y déguster plus de 350 vins, cidres et spiritueux de 49 producteurs. C’est donc une excellente façon de faire un tour d’horizon rapide des vins québécois et de découvrir en même temps d’excellents produits de notre terroir. Visitez leur site pour en savoir plus !

Pour des idées d’accords mets-vins originaux avec des vins du Québec, notre article «Rencontre avec Albane Cannaferina : les accords mets-vins de La Cabane 2014

À la santé de tous les producteurs du Québec et à la vôtre !

Alain P.


Liens

Canadian wine (Wikipedia)
Cellared in Canada (Wikipedia)
Ils étaient quatre. (David Pelletier, blogue Le Sommelier Fou)

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